Elle éprouve le désir de s’élancer échevelée à travers bois.
Elle veut retrouver la fraîcheur des rivières et des sources. Elle se souvient : elle est naïade et elle pense , avec nostalgie, à ces sources qu’elle a quittées.
Oui, elle les a quittées ainsi que toute cette vie de sauvage liberté ; elle les a quittées pour Orphée.
Orphée, l’enchanteur , le charmeur, le poête. Orphée dont elle est devenue l’épouse.
Il l’a charmé Orphée, comme il charme tous les êtres qui entendent son chant.
Elle se souvient : les oiseaux eux mêmes écoutaient le doux son de sa Lyre en silence. Les animaux quittaient la forêt pour le suivre.
Elle aussi a quitté la forêt et ses soeurs.
Comment résister?
Même les serpents sortent de leur trou, jusqu’aux pierres qui s’écartent sur son passage.
Tout un monde d’enchantement et elle s’est fondue dans ce monde.
Ainsi la naïade Eurydice est tombée sous le charme du mortel Orphée.
Elle court, elle court Eurydice, à la recherche de son monde d’avant, peuplé de sources, de cachettes, d’arbres dans la clairière.
Eprouve-t’elle des regrets ? Une nostalgie pointe
Elle court, elle court Eurydice...
Quand soudain,
une douleur aigüe au pied arrête ses pensées, arrête sa course.
Un voile noir et puis plus rien.
Tout s’estompe, tout s’efface.
Résolu de tout affronter, même les ombres,
il osa descendre vers le Styx par la porte du Ténare, à travers ces peuples, fantômes honorés,
ancêtre funèbres.
Il aborda le Cerbère ,
maître de ces demeures désolées.
Les cordes de sa lyre frémissent.
Sur la rive du Styx, Orphée trouve Charon, le passeur. Chaque mort doit lui payer son Obole.
Orphée le poète l’enchante de son chant. Et vivant, le premier, il passa sans payer.
Il disait , et les frémissement de sa Lyre se mêlaient à sa voix, et les pâles ombres pleuraient.
Il disait,
et les filles de Bélus se reposent sur leurs urnes,
et la roue d’Ixion s’arrête étonnée,
et toi, Sisyphe, tu t’assieds sur ton fatal rocher.
et les vautours cessent de ronger le flanc de Tityus,
et Tantale ne poursuit plus l’onde fugitive,
Alors pour la première fois, des larmes mouillèrent les joues des Euménides. Ni la souveraine des morts, ni celui qui règne sur les mânes ne peuvent repousser sa prière. Ils appellent Eurydice.
Ainsi, Orphée était le seul mortel à pouvoir faire revenir à la vie ici-bas Eurydice. A une condition cependant, tant que leur chemins foulent le domaine des ombres, l’un comme l’autre ne pourraient échanger un regard...